Christophe - Dandy clodo

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Christophe

Inlassable, inclassable chercheur de sons, le père mythique d'Aline apparaît et disparaît au gré de son inspiration "super-lunaire". Sûr de rien.

Quand arrive l'heure du thé pour les autres, la journée commence pour lui. "Je plane au-dessus du monde, dit-il, je vis en suspension." Comme chaque semaine, Christophe est allé au kiosque acheter Elle. Pour l'horoscope. "Je suis super lunaire", précise-t-il, le regard planqué derrière d'épais verres bleus, raccords avec le ciel du jour, et sans lesquelles il voit "multiplié par trois". Cela dit, on ne tarde guère à s'apercevoir que, malgré ses hublots, Christophe vit dans la troisième dimension. "Je n'ai pas de réalité et je n'en ai jamais eu. Je suis dans ma bulle."

Le temps des yéyés.

Crinière mercure, indéfectiblement moustachu, c'est un type qui se lance soudain dans une lyrique déclaration d'amour à Björk avant de vous décrire, dans la foulée, le sublime gilet d'un maître d'hôtel dont il souhaite s'inspirer pour une de ses nouvelles tenues. Vous, discretement, vous avez remballé votre arsenal de questions soigneusement préparées : cette interview ne ressemble à aucune autre. Avec ses fulgurances et ses fêlures, cet esthète désarçonne. Le vieux beau, sacrifié sur l'hôtel de la variété et ringardisé aussi vite qu'on le porta aux nues, tient pourtant plus de Gainsbourg que d'hervé Vilard. "On considère qu'Aline n'est qu'une chanson pour minettes. Mais l'a-t-on jamais perçue comme un blues? Ce n'est pas si loin de Baby please don't go de Lightnin'Hopkins."
C'était le temps des yéyés, l'été 65, et l'idole donnait le coup d'envoi à une carrière en montagnes russes. Depuis, le chanteur reste une appaition, avide d'imprévu. Il s'enrôle dans un cirque, pilote d'un seul pied ses voitures de courses à 300 à l'heure (ce qui lui a valu un retrait définitif du permis), vit dans des palaces comme dans des roulottes. Souvent "borderline", Christophe aurait pu "crever cent fois". "J'aime l'accident, dit-il. Le plus grand moment, c'est la seconde qui vient."

Laborantin de l'extrême.

Cinq ans après Bevilacqua (son vrai patronyme, venu d'Italie), un album expérimental au succès limité, le chanteur revient en 2001 avec Comm'si la terre penchait (Mercury). Laborantin de l'extrême, cet inlassable chercheur de sons a créé un petit bijou, objet étrange et enivrant. Il a passé des nuits entières dans son petit studio pour "trouver l'alchimie particulière, quelque chose de vibrant, d'émotionnel." A 57 ans - le 13 octobre -, le gars de Juvisy-sur-Orge est adopté par la planète électro et célébré par la jeune génération, venue en foule assister à son retour sur scène (après 27 ans d'absence) à l'Olympia, en mars dernier.
Le dandy clodo a cette capacité de survie que lui envieraient nombre de ses congénères. Dans un sourire, il avoue son secret : "Je hais les habitudes et je m'adapte, partout et tout le temps." Tel le phénix, Christophe renaît, ayant rayé à jamais une seule phrase de son vocabulaire : "Je suis sûr."

Article tiré de "Télé 7 jours"



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